-
Amy, je suis désolée, mais tu dois aller chez une Silhouette.
Clara poussa un cri
horrifié.
- Une Silhouette ?
C'est quoi ?
- Les Silhouettes sont
les serviteurs les plus fidèles de l'Ombre. Le mieux est de ne jamais parler
avec eux, sauf en cas de force majeure, car ils ont le don de vous faire dire
des choses dont vous ne connaissez même pas l'existence dans votre tête. En
général, lorsque l'on est appelé par une Silhouette, c'est qu'il a dû se passer
quelque chose de grave. Or, tu es nouvelle, donc je ne vois pas ce qui a bien
pu se passer. Dans tous les cas, tu es obligée d'y aller.
- L'Ombre a tué Joanna.
- Je sais. C'était
l'une de nos meilleures agents. J'oubliais : il faut que tu saches que si
tu es appelée par une Silhouette, c'est que l'Ombre en personne a prononcé ton
prénom, et c'est plutôt de mauvaise augure, s'il te connaît. Amy, je suis
désolé de te dire tout ça, mais il faut que tu comprennes ce qu'il va t'arriver.
- Ce qu'il va
m'arriver ? Je ne pars pas pour boire une tasse de thé chaud avec mon meilleur
ami ?ironisais-je, pas très confiante.
- Amy!vociféra le
directeur. Tu n'as pas le droit de plaisanter avec ça. Tu pourras quand
même participer au Bal des Apprentis de demain soir. Après, dès l'aube, tu
devras te rendre chez l'Ombre. Dans sa propre forteresse.
- C'est
horrible !couina Clara.
Le directeur lui lança
un regard noir et poursuivit, la voix chevrotante :
- Il se peut que tu ne
reviennes jamais parmi le monde des vivants, Amy.
Clara et le directeur
essuyèrent une larme en même temps, puis le directeur proposa :
- Je vais peut-être vous accompagner jusqu'à la Salle des Préparations ?
- Je veux bien, dis-je,
pensive.
Après avoir arpenté une
demi-dizaine de couloirs, le directeur nous laissa devant une porte en bois et
ajouta avec un faible sourire :
- Bonne soirée.
Clara, impatiente,
ouvrit la porte et déboula dans la pièce, me laissant seule sur le seuil. La
pièce était garnie de plusieurs mannequins possédant chacun un grand tabouret
où un élève était assis. Certains élèves me dévisageaient avec compassion,
comme s'ils avaient suivis les propos du directeur en direct, d'autres avec
terreur et certains avec mépris. Une femme rousse, plutôt rondouillarde,
s'avança vers moi et me demanda de m'asseoir. Comme la seule place libre se
situait tout au fond, à côté d'une pile de cartons, je dus passer devant toute
la classe et m'assit sur mon tabouret, qui, malencontreusement, tomba par
terre. Toute le monde rigola et même la professeur sourit légèrement. Rouge
de honte et de colère contre moi-même, je me levai et m'assit, fixant un point
invisible droit devant moi. La professeur commença à parler, toujours
souriante :
- Bien. Vous allez
commencer par tourner le mannequin face à vous. Très bien. Ensuite, pensez très
fort à la tenue que vous rêvez d'avoir pour une soirée. C'est bon ? Bien.
Maintenant, faites un croquis de la tenue que vous venez d'imaginer.
- Mais je ne sais pas
dessiner !protesta une voix.
- Moi non plus, en
ajouta une autre.
- Dans ce cas, fermez
les yeux et imaginez qu'ils sont ouverts et que vous décalquez. Ça devrait
fonctionner. Pensez aux tissus et aux matériaux que vous voudriez, une robe en
papier, ce n'est pas très beau.
- Wow, ça
fonctionne!confirma quelqu'un en exhibant son dessin.
- Ouais, c'est
vrai ! Et en plus, ça va super-vite!renchérit quelqu'un d'autre.
- Les enfants, vous
n'allez pas crier à chaque fois que je vous dis quelque chose, quand
même ?
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